La tétine / sucette et ses impacts potentiels sur votre allaitement

La tétine / sucette et ses impacts potentiels sur votre allaitement

Par :   Myriam Panard.   |  Categories :   Zoom sur

Dans notre culture, l’image de la sucette-tétine (« tute ») est inséparable de celle d’un bébé et même d’un bambin puisqu’il est souvent difficile pour certains d’entre eux de s’en sevrer au moment de l’entrée à la maternelle !

Tous les poupons vendus dans le commerce ne sont-ils pas pourvus d’une sucette dans la bouche? Sans oublier le biberon toujours présent dans la boite. Il suffit aussi de commander un article de puériculture en ligne pour recevoir gratuitement un biberon sans même l’avoir demandé. Le matraquage publicitaire et les stratégies insidieuses de marketing renforcent l’idée que la sucette-tétine est indispensable lorsque l’enfant parait… 

Or, ne pourrait-on pas envisager les choses autrement ?

A bien y réfléchir, quel genre d’accueil offre-t-on à un nouveau-né si on lui met très tôt une sucette dans la bouche ? Quels messages sont alors véhiculés ?

« Ne pleure pas ! Je ne sais pas comment te calmer, ça me stresse de t’entendre crier et puis tu ne peux pas encore avoir faim ? d’ailleurs à la maternité on m’a même dit que tu avais un fort besoin de succion et qu’il ne fallait pas que je devienne ta tétine… »

Cela fait-il écho à votre propre expérience de maman ?

Impacts de la sucette / tétine sur la succion et l’allaitement 

Si bébé pouvait parler, voilà ce qu’il dirait en réponse à vos interrogations, à vos doutes :

« Maman, j’ai faim de toi, de ta peau, de ton odeur, de ta chaleur… pas seulement de ton lait. J’explore et j’apprends beaucoup avec ma bouche. Plus je passe de temps peau contre peau avec toi, cœur contre cœur, plus tu sauras à quel moment me faire téter et mieux je saurai le faire, on trouvera ensemble l’accord parfait… Mais si tu me donnes trop souvent et trop longtemps la sucette, tu ne sauras plus reconnaître mes appels. On sera moins connectés. Je téterai rageusement ce petit bout de silicone et mes compétences seront alors compromises. 

allaitement et impact de la sucette

Des risques de douleurs pour maman

Je risquerai alors de te pincer et de te faire mal aux mamelons, bien contre mon gré bien sûr mais ma langue sera désorientée. Je risquerai aussi de me fatiguer davantage et ne prendrai pas autant de lait, du coup je prendrai moins de poids. Tes seins moins sollicités risqueront de s’engorger, et si tu n’y prends garde tu pourrais même attraper une infection (mastite ou candidose) et moi aussi d’ailleurs (muguet, otite). (En effet, comme disent les experts, la sucette est un vecteur de contamination microbienne. Et ça fait très mal…)

Une prise de poids ralentie et diminution de la lactation

A force de me donner la sucette, et des biberons de compléments de lait si ma prise de poids ralentit, je me détournerai sûrement de ton sein ma maman chérie… et notre histoire d’allaitement se terminera plus tôt que tu ne l’imaginais ! 

Une dépendance à la sucette et sevrage difficile entraînant des problèmes orthodontiques par la suite

De plus, si je deviens « accro » à la sucette pendant des années, trouvant en elle le réconfort dont j’ai besoin, tu devras fort probablement faire appel plus tard à un orthodontiste pour que mes dents se mettent mieux en place, mon palais creusé n’ayant pas favorisé une dentition harmonieuse. Le tableau n’est pas réjouissant, n’est-ce pas ?

Alors s’il te plait, prends-moi dans tes bras, regarde-moi, parle-moi doucement, berce-moi et allaite-moi... tu en tireras tellement de satisfaction maternelle au fil du temps… Je sais ce n’est pas facile au début, tu as tout à découvrir de moi mais fais-moi confiance, un jour je n’aurai plus besoin de tes bras pour m’apaiser et m’endormir, je saurai le faire tout seul grâce à tout cet amour et cette attention que tu m’auras accordés. Mais surtout, si cela te semble trop difficile, si tu doutes ou te sens démunie, demande de l’aide, n’abandonne pas ! » 

La succion physiologique : un besoin naturel du bébé ?

Dès le milieu de sa vie intra-utérine, c’est-à-dire vers 20 semaines, le bébé suce déjà ses doigts, son poing et il continue à le faire après sa naissance, c’est un comportement tout à fait normal qui contribue à l’apaiser, c’est en effet une expérience sensorielle agréable, tout comme lorsqu’il est au sein. C’est la continuité naturelle de la grossesse. 

Vous nourrissiez votre bébé H24 lorsqu’il était dans votre ventre, maintenant qu’il est dans vos bras, il a besoin d’être nourri de lait bien sûr mais pas que… il a aussi besoin de goûter votre peau, de se nourrir de votre présence rassurante, jour et nuit ; cela facilite son adaptation et favorise le lien qui vous unit. La sucette interfère dans ce processus, cela bouscule les schémas physiologiques, ce n’est de toute évidence pas du tout la même expérience sensorielle…

besoin de succion du bébé allaité

La bouche n’est-elle pas un moyen d’entrer en lien, de s’attacher à une personne ? On le sait bien lorsqu’on est amoureux !

De plus, des études observationnelles ont montré que l’usage répété et prolongé de la sucette chez un bébé allaité pouvait :

- diminuer la durée de l’allaitement et induire un mode de maternage moins proximal

- augmenter les risques d’otites chez les enfants (voir étude finlandaise de Marjo Niemelä)

- creuser le palais du bébé et réduire ainsi l’angle des mâchoires, ce qui laisse moins de place aux dents de s’implanter (voir étude de Brian Palmer en bas de l’article)

L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et l’IHAB (Initiative Hopital Ami des Bébés) recommandent d’ailleurs clairement de ne pas utiliser de tétine, ni de sucette sauf cas particuliers (voir liens en bas de l’article). 

Alors comment aider votre bébé à s’apaiser sans tétine / sucette ?

Il est tout à fait possible d'apaiser bébé sans avoir recours à la sucette qui crée une dépendance et peut perturber la mise en place ou le maintien de votre allaitement.

Voici une échelle de suggestions inspirée d’un document créé par SOS préma intitulé « La succion : un soutien au développement de votre bébé » auquel j’ai moi-même participé. Imaginez votre bébé qui commence à s’agiter dans son lit, vous sentez qu’il a besoin d’être apaisé, qu’il cherche peut-être le sommeil et à la place de lui mettre une sucette dans la bouche, voici ce que vous pourriez faire :

apaiser un bébé sans tétine sucette

1/ Prononcer des paroles douces et réconfortantes avec des intonations variables mais enveloppantes de l’endroit où vous vous trouvez

2/ Chercher ensuite à plonger votre regard dans celui de votre bébé, tout en continuant à lui parler ou à chantonner

3/ Poser vos mains sur son abdomen tout en continuant à le regarder et lui parler

4/ Le prendre dans vos bras tout en le regardant et lui parlant

5/ Le bercer dans vos bras sur place ou en marchant ou le placer en écharpe avec son petit corps bien regroupé contre le vôtre à hauteur de bisou, ses petites mains proches de son visage

6/ Et si malgré tout cela, vous sentez que votre bébé cherche à téter votre visage ou son poing et que l’agitation monte, proposez-lui alors le sein et laissez la magie opérer !

Quand la sucette peut-elle être utile ?

En réalité, la seule situation où la sucette peut avoir sa place est lorsque vous êtes séparée de votre bébé en cas d’hospitalisation, lorsqu’il doit subir des soins potentiellement douloureux et que vous n’êtes pas à ses côtés. On sait que la tétée est le meilleur analgésique, vient ensuite le contact en peau à peau ou la succion d’une solution sucrée avec une tétine.

 

Pour conclure, le choix d’utiliser ou non la sucette vous appartient. Prenez le temps d’observer et de comprendre votre bébé, il a tant à vous apprendre… Ayez confiance, vos compétences de parents vont grandir jour après jour et l’idée du recours à la sucette sera vite de l’histoire ancienne. Votre bébé a besoin de VOUS et non d’un objet de substitution.

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